Budget supplémentaire 2024
Monsieur le Président, chers collègues,
Mon intervention concernera à la fois le présent rapport et le rapport n° 2, relatif au budget supplémentaire.
Nous l’avons tous constaté, le thème des finances publiques a suscité nombre d’articles et de commentaires ces dernières semaines. Aussi, je tiens à dire quelques mots sur la situation nationale. Il y a un mois, on apprenait que le budget 2024 – adopté par 49.3 fin décembre – allait être amputé d’au moins 10 milliards d’euros, des efforts plus lourds devant intervenir d’ici 2027.
Cette semaine, on a appris que le déficit public de la France en 2023 était beaucoup plus important que prévu (5,5 % du PIB d’après l’Insee quand la loi de finances annonçait 4,9 %), tout cela rendant les objectifs affichés pour l’exercice actuel encore plus hasardeux.
Vous admettrez comme nous que la politique de baisse de la fiscalité, notamment en faveur des plus aisés et des grandes entreprises, sous couvert d’une inepte politique du ruissellement, ne fonctionne pas. Bien au contraire, la situation des plus pauvres s’est dégradée ! On peut le voir dans le Morbihan comme ailleurs, cela a été rappelé avant moi.
Pour sortir de l’impasse dans laquelle ils nous ont conduit, ceux qui gouvernent la France depuis 7 ans n’envisagent qu’une seule option : réduire les dépenses sociales et exiger des efforts des collectivités locales, dont les dépenses de fonctionnement, c’est vrai, ont progressé.
Si le sujet n’était pas sérieux, les propos de ceux qui nous dirigent soi-disant « à l’euro près » seraient presque comiques : qui a décidé, si ce n’est l’Etat, d’augmenter les salaires des fonctionnaires ou de revaloriser les minima sociaux (de façon absolument légitime et nécessaire dans un contexte de forte inflation), autant de dépenses contraintes qu’il est de leur devoir d’assumer ?
Les déclarations du Premier ministre et du ministre de l'Économie et des Finances sont inquiétantes. La nature des efforts qu’ils vont demander aux Français et aux collectivités territoriales va encore faire des dégâts sur les personnes les plus modestes. Plus que jamais, nous appelons de nos vœux une remise à plat du modèle fiscal, répondant à une triple exigence : plus d’équité entre contribuables, plus de transparence pour les citoyens et plus de visibilité pour les élus.
En comparaison de ceux de l’Etat, les comptes du conseil départemental du Morbihan pourraient faire figure de parangon de vertu : des recettes de fonctionnement réalisées à hauteur de 104 % ; une dette qui diminue de 20 % après une cinquième année sans emprunter ; un excédent de clôture de 69,7 millions d’euros.
Dans un contexte compliqué, les finances de la collectivité conservent une santé éclatante, en contraste, disons-le tout de suite, avec une situation sociale qui, à maints égards, se dégrade.
Comme prévu, pour la première fois de son histoire, le Département n’a quasiment plus de recettes liées à sa fiscalité directe. Les recettes de fonctionnement proviennent pour près de la moitié de la fiscalité reversée. Elles diminuent dans l’ensemble de 2,8 % (21,9 millions d’euros en moins), essentiellement du fait de la baisse des DMTO. La part de ces derniers dans les recettes recule par rapport à 2021 et 2022, mais revient à un niveau identique à celui observé dans les années 2019-2020, c’est-à-dire à 20 %. Les prochains mois nous diront si la baisse va se poursuivre ou si on se maintiendra sur un haut plateau.
Dans le même temps les dépenses de fonctionnement ont progressé de 6,5 %. Toutes les dépenses sociales augmentent, y compris dans le domaine de l’insertion (qui avait connu une baisse en 2022). Les hausses les plus marquées concernent les crédits alloués aux personnes âgées (+ 10,83 %) et à la protection de l’enfance (+ 10,59 %).
Les investissements se sont maintenus à un niveau proche de 2022, à plus de 180 millions d’euros, les deux tiers des investissements directs étant dédiés aux routes et aux collèges.
En résumé, nous constatons une fois de plus que le Département conserve des capacités d’action, grâce à une dynamique fiscale très forte au cours des dernières années et parce que dans la décennie passée, le département a moins investi que ses voisins en matière de solidarité.
Je me permets de rappeler qu’en Bretagne, c’est le département du Morbihan qui perçoit le plus de DMTO en euro par habitant, alors que nous avons un taux plus bas que les autres (3,8 % contre 4,5 % dans les autres départements bretons).
Nous n’avons de cesse de demander un Département qui investit davantage dans le champ social. Cela est possible ! (et évitons les éléments de langage en considérant que certains départements seraient sérieux et d’autres non).
Je remets sur la table 3 priorités que nous avions mises en avant :
1/ La Maison départementale de l’autonomie (MDA).
Près de 3 ans après le début de mandat, le compte n’y est pas, le temps de traitement des dossiers des Morbihannais ne s’améliore toujours pas. Le temps d’attente en Morbihan est plus long que chez nos voisins des Côtes-d’Armor et du Finistère.
2/ Concernant le logement, nous avons 20 000 demandes actives de logements sociaux en 2023, contre un peu moins de 16 000 demandes en 2021. Le sujet est national et régional, mais là encore, nous constatons qu’en Morbihan la situation s’exprime avec davantage d’acuité et de difficulté pour les habitants. Vous me répondrez : laissons le temps à Morbihan Habitat de travailler, il y a une feuille de route sur le logement (sur laquelle nous nous sommes abstenus). Mais nos concitoyens attendent des réponses.
3/ La précarité et la pauvreté augmentent selon les dernières données disponibles de l’Insee. Les acteurs sociaux du Morbihan le constatent à l’unanimité. Pourtant, nous l’avons déjà démontré, sous le précédent mandat, 60 postes d'assistants socio-éducatifs (assistants sociaux, éducateurs spécialisés, Conseiller en économie sociale et familiale) ont été supprimés et nous en ressentons toujours les conséquences sur le terrain.
Nous attendons un Conseil départemental offensif sur ces sujets. De nombreux Morbihannaises et Morbihannais attendent de notre collectivité qu’elle assume pleinement son rôle de chef de file des solidarités, parce que ce sont leurs réalités quotidiennes.
Pour conclure, en cohérence avec nos votes lors du budget primitif, considérant que le compte administratif résulte d’orientations que nous ne partageons pas, nous nous abstiendrons.
Je vous remercie.
Mathieu GLAZ