Monsieur le Président, chers collègues,
L’examen de cette seconde décision modificative intervient dans un contexte économique et social dégradé. La semaine aura été marquée par les palabres entre le Gouvernement et les distributeurs de carburants. Les prix de l’énergie sont toujours élevés et le renchérissement de certaines matières premières contribue à installer une forte inflation, qui met à mal beaucoup de nos concitoyens, en particulier dans le domaine alimentaire.
Pour les communes et les départements, la hausse des prix a aussi un impact fort. Au plan financier, le proche avenir apparaît ainsi peu lisible et moins favorable.
Contexte financier peu lisible d’abord car, à l’approche de l’examen de la nouvelle loi de finances, on se demande toujours quelles sont les véritables intentions de l’État à propos des ressources des collectivités territoriales. On évoque de façon encore nébuleuse leur participation au redressement des comptes publics. Le budget du Morbihan apparaît comme une exception : même si le montant de l’emprunt d’équilibre est revu à la hausse pour 1 693 000 euros – c’est une première symbolique depuis ce début de mandat – vous avez déclaré ici même qu’en 2023 le non-recours à l’emprunt était fort probable. Il n’y a en réalité peu d’inquiétude à avoir sur ce point.
Contexte financier moins favorable ensuite, car la dynamique des DMTO s’étiole. C’était attendu, vous l’aviez dit là encore lors de la précédente session et nous ne l’avions pas contesté. Au plan national, le montant perçu en 2023 pourrait être inférieur de 20 % à celui perçu en 2022. Dans le Morbihan, les encaissements constatés pourraient être moins mauvais qu’ailleurs : ils sont en recul de 16 % sur les huit premiers mois de l’année 2023, par rapport à la même période de l’année passée. Une baisse qui couvre des réalités très variables d’une commune à une autre, il faudra y être vigilant. Pour notre collectivité, on s’achemine toutefois vers des niveaux au moins aussi bons qu’il y a 3 ou 4 ans, qui n’étaient pas des années de vaches maigres.
En résumé, la rigueur qui caractérise la gestion budgétaire du Morbihan, malgré la diminution relative des DMTO, laissent des marges d’action. La décision modificative est limitée (8,8 millions d’euros de dépenses nouvelles contre 60 millions d’euros pour la DM2 en 2022) et s’avère essentiellement technique.
Le département du Morbihan a de nouvelles recettes de fonctionnement. Ce sont 7 millions d’euros supplémentaires qui arrivent dans le budget.
En face, vous annoncez des dépenses de fonctionnement nouvelles, approchant les 8 millions d’euros. Ces nouvelles dépenses sont obligatoires. En effet, les informations préoccupantes et les cas difficiles dans la protection de l’enfance sont en hausse. Le nombre de personnes âgées et en situation de handicap bénéficiant de notre aide augmente. En termes de gestion des ressources humaines, vous appliquez les revalorisations décidées par d’autres. Il ne s’agit pas (ou très peu) de volontarisme de la part du Conseil départemental.
A ce titre, le Département n’a pas vocation à subir, il pourrait aussi agir et engager une réflexion sur la revalorisation des régimes indemnitaires des agents du Département, prenant en compte l’inflation.
Il va sans dire que nous ne nous opposons pas à ces dépenses nouvelles, ni aux investissements qui ont été proposés, à hauteur d’1 million d’euros.
Néanmoins, nous nous abstiendrons sur ce rapport. Mêmes réduites, les marges de manœuvre restent réelles et nous aurions équilibré différemment cette deuxième décision modificative, en renforçant le rôle de rempart et protecteur que doit jouer notre collectivité.
L’inflation fragilise les actions portées par des acteurs qui œuvrent dans le domaine de l’autonomie (handicap et personnes âgées) ou qui luttent contre la pauvreté et la précarité. Vous nous répondrez que vous aidez les structures à hauteur de leurs besoins. Mais, nous n'avons aucun élément pour le vérifier. Nous ne savons pas ce qu'elles demandent, pour nous permettre de le comparer avec ce qu'elles obtiennent. Nous ne savons pas comment le département intègre le contexte difficile que j'ai expliqué lorsqu'il attribue certaines aides.
Vous nous permettrez donc d'être prudents. Depuis 2 ans nous appelons de nos vœux un Département qui prenne davantage les devants, qui agisse de manière préventive (sans attendre qu’on frappe à notre porte) et sur ce sujet nous ne désespérons pas de vous convaincre. Même en adoptant une logique purement comptable, nous savons bien qu’une hausse de la précarité coûtera in fine plus cher aux finances départementales. Une intervention tardive qui se révèle plus coûteuse que si elle avait été anticipée, c’est une vérité qui ne vaut pas que pour les églises et le château de Kerguéhennec.
Une inflexion serait cohérente avec l’ambition sociale que vous annonciez lorsque vous avez été élu président.
Nous espérons voir une prise en compte de ces réalités apparaître lors des orientations budgétaires du mois de novembre.
Je vous remercie.
Mathieu GLAZ