Discours de politique générale, 16 juin 2023
Monsieur le Président, chers collègues,
Lors de notre premier discours dans cette assemblée, nous soulignions 3 points qui nous semblaient importants et à ne pas perdre de vue dans notre mandat en cours :
Le premier concerne notre immense défi commun, celui de conserver une planète habitable d’ici au milieu du siècle prochain : il nous faut activement lutter contre le changement climatique et adapter nos territoires à celui-ci.
Le second porte sur la question de la fracture sociale et la lutte contre les inégalités.
Le troisième point était la profonde crise de confiance entre nos concitoyens et nous, les élus.
Aujourd'hui, nous allons à nouveau aborder ces 3 sujets. Malheureusement, deux ans après notre élection, il est évident que nous nous enfonçons dans chacune de ces crises qui se nourrissent mutuellement.
En ce qui concerne la crise de confiance de nos concitoyens envers nos institutions démocratiques, nous constatons une brutalisation du débat public à tous les niveaux. Le passage en force du gouvernement face à l'opposition massive des Français à la réforme des retraites marque une rupture qui laissera des traces profondes.
Dans ce contexte, en tant qu'élus locaux, nous avons le devoir d'être présents, d'écouter quotidiennement nos concitoyens et de construire des réponses à leurs attentes.
Nous venons de voir dans la presse, Monsieur le Président, que vous êtes candidat pour briguer une nouvelle présidence, celle d'un comité national sportif bien connu (fin juin), à quelques mois des Jeux Olympiques.
Vous occupez déjà différents mandats qui exigent plus qu'un temps partiel, Monsieur le Président. Nous pensons que les Morbihannais méritent un président du Conseil départemental à temps plein, capable d'être réactif et présent pour faire face à des situations de plus en plus difficiles au quotidien. Les citoyens ont besoin d’avoir des élus à 100%.
Enfin, au nom de notre groupe de Gauche et Écologiste, nous tenons à saluer l’ex-maire de Saint-Brévin qui, faute de soutien de l'État face à l'extrême droite, a dû démissionner et quitter sa ville.
Les cas se multiplient : le maire d'Annecy, François ASTORG, suite au drame qui a frappé sa ville, a fait l'objet d'un appel à la vengeance parce qu’il est métis et qu’il assume une politique d'accueil des exilés sur son territoire.
Hakim BOUASKA, élu écologiste du Var, a été violemment agressé à proximité d'un rassemblement de Reconquête, le parti d’Éric Zemmour (bras fracturé, entorse cervicale, 30 jours d’ITT).
Certains élus de notre groupe se retrouvent également menacés, nos visages et identités étant diffusés sur un site d'extrême droite.
Nous souhaitons que notre position soit unanime dans cette assemblée : aucune complaisance envers l'extrême droite, car nous connaissons trop bien leurs pratiques et nous les voyons maintenant à l'œuvre.
Maintenant, quelques nouvelles très inquiétantes du dérèglement climatique
Une étude récente montre que dès 2030 la banquise d’été n’existera plus en arctique.
Jusqu’à présent cette possibilité était évoquée pour le milieu du siècle. Elle démontre que le changement climatique est beaucoup plus en avance que prévu et surtout cette fonte va générer la mise en branle d’une machine infernale : les boucles de rétroactions qui vont encore plus accélérer le phénomène.
Pour être plus clair : la mer qui remplace la glace absorbe beaucoup plus l’énergie solaire (avec un soleil présent 24/24 en été) participant donc à l’accélération du changement climatique et les sols qui se dégèlent libèrent du méthane qui a une capacité d’effet de serre 25 fois plus élevé que le CO2 !
Ces nouvelles sont catastrophiques et nous devons en permanence avoir cela à l’esprit il en va de l’habitabilité à court terme de notre planète. Il nous faut tout changer et très vite.
En ce sens, deux rapports qui sont présentés aujourd’hui marquent des inflexions intéressantes.
Nous examinerons celui dédié au schéma des mobilités. Vous en avez parlé. Boris LEMAIRE interviendra pour partager la position de notre groupe sur ce sujet. Nous validons un certain nombre d'orientations qui sont prises même si à notre sens cela reste trop timide au vu de l’urgence à agir. Mais dans le même temps, par dogme politique, vous allez revenir à 90 km/h sur une partie du réseau alors qu’il génère automatiquement pollution supplémentaire et risque routier accru.
Nous examinerons également un rapport en vue de créer un schéma directeur immobilier énergétique du patrimoine départemental. C’est une bonne chose, il nous faudra mettre les bouchées doubles, nous ne sommes pas un département en avance.
J'en viens maintenant à la question sociale. Au cours des deux dernières années, la forte inflation a appauvrit rapidement les populations les plus vulnérables. Certains de nos concitoyens, qui pensaient être épargnés, se retrouvent en difficulté sans savoir vers qui se tourner, ou n'osent pas demander de l'aide par honte. La tension sur le logement n'a jamais été aussi forte sur notre territoire.
En tant que chef de file des solidarités, le département doit pouvoir faire davantage pour répondre à ces difficultés.
Aujourd'hui, nous examinerons un rapport sur le FSL (Fonds de Solidarité pour le Logement). Nous saluons les efforts déployés pour comprendre pourquoi nos concitoyens font de moins en moins appel à ce dispositif, malgré les difficultés. Pour autant, nous vous proposerons par la voix de Rozenn Métayer d’agir sans attendre.
Il est clair que l'accès aux droits et la lutte contre le non-recours doivent être des axes stratégiques des politiques de prévention sociale et de réduction de la pauvreté.
Il existe des acteurs de terrain qui ont développé des savoir-faire et mis en place des réseaux efficaces pour lutter contre le non-recours. Nous pourrions envisager des expérimentations avec eux et les intégrer dans le Plan Départemental d'Insertion (PDI). Nous pensons par exemple au PIMMS de Lorient, qui intervient également en milieu rural et qui n'a jusqu'à présent pas bénéficié du soutien du département.
Les centres sociaux sont d'autres acteurs de proximité importants. Vous avez récemment rencontré les cinq centres sociaux de Lorient et la Fédération des centres sociaux bretons, dans le quartier du Bois du Château. Nous vous remercions encore de cette visite. Je crois que vous l'avez appréciée et qu'elle vous a permis de mieux comprendre leur importance pour nos concitoyens dans nos quartiers et nos communes.
Le département à des marges de progrès dans le soutien aux centres sociaux notamment en reconnaissant et accompagnant le travail de connexion que ces structures opèrent, avec les différentes structures sociales dont beaucoup dépendent pour tout ou partie du département.
Nous vous proposons donc de donner une suite à cette visite en créant un groupe de travail chargé de réfléchir à une politique de soutien plus affirmée à ces structures. Cela permettrait également de reconnaître le travail de qualité réalisé dans l’ensemble du Morbihan (Auray, Pontivy, Guer, Allaire, Limerzel notamment).
Un des sujets à l'ordre du jour des conseils municipaux et communautaires dans le Morbihan est la révision du schéma départemental d'accueil des gens du voyage pour la période 2023-2029. Il s'agit avant tout d'une question relevant du bloc communal, qui consiste à trouver des espaces pour accueillir dignement ces personnes. Cependant, nous demandons au département de rétablir l'accompagnement qui existait par le passé, notamment en matière de médiation sociale destinée principalement aux femmes et aux enfants, afin de leur permettre une scolarisation adéquate.
Autre sujet préoccupant est celui de la santé mentale des jeunes, en particulier des mineurs. Nous constatons des faits dramatiques au niveau national, et parfois même ici dans le Morbihan.
Hier à Lorient, avec Marianne Rousset, nous avons assisté à l’inauguration du nouveau dispositif ambulatoire pour les adolescents à Lorient... Dans le même lieu, sont maintenant regroupés :
- Une maison des adolescents
- Un Centre médico-psychologique (CMP)
- Et maintenant un Hôpital de jour pour adolescents
L’ensemble des professionnels qui se sont exprimés ont souligné la dégradation dramatique et extrêmement rapide de la santé mentale de nos jeunes, des plus petits aux jeunes adultes en passant par les adolescents.
Il y a une augmentation de l'anxiété, de la consommation de substances addictives, des idées suicidaires et du harcèlement scolaire. Les passages à l’acte sont de plus en plus nombreux.
Les facteurs sont probablement multiples, mais la crise sanitaire a déclenché et accéléré ce phénomène. Évidemment, le sort écologique de la planète, l’usage immodéré des écrans ne sont pas étrangers à cette situation. Comment allez bien quand on est adolescent dans un monde qui va mal ?
Bien sûr, ces sujets sont délicats à aborder et ne dépendent pas uniquement du département. Cependant, notre collectivité doit réfléchir aux actions qu'elle peut entreprendre en collaboration avec d'autres acteurs afin de répondre à cette problématique.
Hier, lors des discussions avec les professionnels, les besoins exprimés étaient souvent très modestes : quelques centaines d’euros pour mettre en place un projet éducatif à l’année, une somme équivalente pour équiper en matériel une classe externalisée accueillant des collégiens.
Le département doit pouvoir faciliter le rôle de ces professionnels qui, par ailleurs, sont confrontés à des sous-effectifs chroniques. Bien entendu, il convient de souligner que cette situation ne relève pas directement de notre compétence.
Autre exemple celui de Questembert et de l'utilisation du CLSPD (Contrat Local de Sécurité et de Prévention de la Délinquance) comme outil de décloisonnement, de circulation de l’information au service d’une meilleure réponse des institutions est à regarder et à reproduire.Monsieur le Président, il y a là un sujet majeur, il en va de l’avenir de notre jeunesse, vous engagez vous à agir ?
Damien GIRARD - Président du groupe de Gauche et Écologiste