Monsieur le Président, Cher-e-s collègues,
L’été qui vient de s’achever, est celui d’un nouveau genre, un genre qui est amené à se reproduire et à s’aggraver si on en croit les experts du climat que nous avons collectivement que trop peu écoutés jusqu’à présent. Les canicules se sont succédé comme jamais, atteignant parfois ici en Bretagne des records inégalés, la sécheresse qui nous frappe est totalement inédite, elle est toujours en cours. Nous sommes condamnés à espérer un automne et hiver très pluvieux permettant de recharger nos nappes phréatiques et nos milieux naturels en humidité. Ces phénomènes extrêmes, évidemment, n’ont pas été sans conséquences, nous l’avons tous constaté, les incendies se sont succédé en Bretagne et ici dans le Morbihan. Nous voulons, comme vous, remercier et féliciter les sapeurs-pompiers morbihannais et celles et ceux qui sont venus d’autres départements pour stopper les incendies. Notre collectivité devra dans les années à venir adapter ses dispositifs aux nouveaux enjeux qui font face à nous, cela passe évidemment par une augmentation du nombre de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires.
Mais pour faire face à ces nouveaux enjeux, nous ne pouvons pas uniquement nous appuyer sur un corps de sapeurs-pompiers renforcé. Il nous faut faire grandir la culture du risque au sein des populations du Morbihan. Nous sommes un des pays d’Europe les plus en retard sur cette question, d’autres pays à travers le monde ont su construire cette sensibilité et compétence, il s’agit pour nos populations d’avoir les bons réflexes en cas de phénomène extrême. Ceux-ci peuvent être liés à des incendies puisque nous avons vu que nous ne sommes plus épargnés mais ça peut être aussi en cas de tempêtes majeures, d’inondations, de submersion marine… Le département est légitime pour impulser et renforcer ce type de politique en vue de se préparer à des phénomènes inédits. Il en va de la vie de nos concitoyens. Nous devons mieux nous préparer en cas d’alerte météo orange ou rouge, savoir ne pas se mettre en danger, savoir où trouver les bonnes consignes, savoir pratiquer les gestes de premiers secours…
S’adapter au dérèglement climatique c’est aussi cela !
Dans les recommandations du GIEC en termes d’adaptation dérèglement climatique, il est défini que la préservation des milieux naturels riches en biodiversité participe à mieux absorber les phénomènes extrêmes. A ce titre, notre département à travers les Espaces Naturels Sensibles qui sont des espaces protégés et préservés doit jouer un rôle bien plus important que maintenant. Relever la fiscalité sur les aménagements tel que proposé dans cette séance à 1.5% va dans le bon sens car comme vous le savez ces sommes sont fléchées vers ces compétences (avec le CAUE). Pour autant nous sommes loin du maximum possible (2.5%) et au vu des enjeux et du travail à réaliser en la matière ce serait une faute d’en rester là dans les années à venir.
Cet été, nous avons également suivi vos déclarations sur la vitesse sur les routes. Nous avons compris que le passage de 80km/h à 90km/h serait à l’étude sur les routes départementales du Morbihan.
Nous considérons qu’augmenter la vitesse n’est pas le sens de l’histoire. Nous connaissons les chiffres des accidents en Morbihan, ils sont clairs. La 2e cause d’accident est la vitesse, après l’alcool et les stupéfiants. Ainsi, la vitesse est en cause, dans près de 45% des accidents mortels sur les routes départementales. Nous devons donc aborder ce sujet avec énormément d’attention, car derrière les décisions prises, il s’agit de vies humaines. Et pour finir sur ce sujet, à l’heure où enfin tout le monde parle de sobriété et donc de réduction des consommations énergétique, après l’été que nous venons de passer, quel message adresserait-on si dans le même temps on autorisait une vitesse qui génère au minimum 10% de consommation de carburant supplémentaire par rapport à l’existant ?
Autre sujet paru dans les journaux, votre volonté de supprimer les moyens accordés au Comité des Œuvres Sociales. Lors de votre premier discours en tant que Président du Conseil Départemental, vous avez dit que ce serait le mandat du social ! Nous pensions que vous l’appliqueriez également à destination des agents qui travaillent au sein du Conseil Départemental ! Pourquoi voulez-vous supprimer ce qui fonctionne bien aujourd’hui ? Le COS bénéficie à de nombreux agents, qui reçoivent des prestations supérieures à la somme de 150€ qui est celle que vous leur avez proposée dans un courrier. Nous considérons que le COS est un bon investissement, peu coûteux pour la collectivité, que le COS participe à la bonne entente entre les agents, et que c’est un facteur d’efficacité de l’administration au service des politiques portées par le département.
Un autre sujet, social, celui des fonderies de Bretagne, les salariés sont inquiets et à raison pour leur emploi. Par ailleurs, il s’agit de savoir-faire importants et nécessaires pour la Bretagne, cet outil industriel doit être préservé, car même les voitures électriques ont besoin des pièces qui sont produites à Caudan. Ce n’est pas la transition écologique qui tue les Fonderies de Bretagne, c’est bien la recherche de rentabilité à court terme, la même logique qui a concouru à la désindustrialisation de notre pays. Nous vous avons proposé un vœu à examiner lors de cette session, nous espérons qu’il sera adopté.
Lors de la session du mois de mars de cette année, notre collectivité a adhéré à l'association Transparency international France. Nous nous sommes notamment engagés à « promouvoir des pratiques intègres et transparentes ». Nous renouvelons une demande qui a systématiquement été faite lors des commissions permanentes sans résultat jusqu’alors. Nous souhaitons que soit présenté le budget global des manifestations ou opérations qui sont proposés au financement. Sans cela, il est plus que difficile de mesurer l’importance de l’aide apportée à celles-ci.
À propos de l’aide de 50 000 € aux communes. Nous avions l’année passée proposé que le département puisse participer à orienter les projets vers une meilleure intégration des enjeux écologiques via une aide renforcée des projets exemplaires en la matière. L’intégration des investissements en matière de transition énergétique que vous avez ajoutés, ne change pas grand-chose à l’existant, et est bien loin de correspondre à ce que nous attendions. Nous détaillerons au cours de la session une proposition précise de bonus écologique avec des critères clairs. Mais la question que j’ai envie de vous poser est celle-ci ? Pensez-vous vraiment que nous avons le temps d’attendre et d’avancer aussi peu ? Je rappelle ici que le GIEC implore une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 5% chaque année pour rester au-dessous des 2°C de réchauffement moyen. Je rappelle également qu’actuellement nous sommes à +1.1°C par rapport à l’ère préindustrielle, imaginez nos futurs étés avec 2 ou 3°C de réchauffement moyen !
Enfin, un mot sur la partie budget et sur la deuxième décision modificative de l’année, qui sera soumise à notre assemblée.
Il y a un contexte national, où certes, nos recettes risquent de connaître à brève échéance de nouvelles évolutions, avec notamment le projet de suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. D’un côté nous avons un président de la République qui souhaite travailler avec les collectivités locales, ce qui est légitime et nécessaire et de l’autre côté décision après décision il réduit notre autonomie.
Néanmoins, nous avons des marges de manœuvre conséquentes. Il y a plusieurs facteurs qui expliquent cela, parmi lesquels la diminution des bénéficiaires du RSA conjuguée à des recettes très élevées de droits de mutation, qui nous ont permis dans une période de crise, d’améliorer la situation financière du département. Cela est relevé dans le rapport de la chambre régionale des comptes.
Lorsque nous disions en décembre 2021 que le budget prévisionnel était à la limite d’être insincère, nous étions dans le vrai. Ainsi, si nous reprenons le procès-verbal de décembre 2021, nous pouvons y lire que nous anticipions, avec prudence, 160 millions d’euros de DMTO et par conséquent il fallait redimensionner les recettes de fonctionnement et notre budget global.
D’ailleurs la CRC relève aussi des prévisions trop sommaires des DMTO, qui ne sont pas accompagnées de tableaux de bord financiers suffisamment précis, ni de plan de trésorerie permettant d’adapter le budget. Cette problématique persiste et nous empêche, au moment du vote du budget, de positionner des dépenses ou investissements en face de recettes que nous aurons.
Nous connaissons votre réponse sur la réduction de l’emprunt et l’instabilité des DMTO, qui (rappelons-le) ont augmenté chaque année depuis 2013, quasiment 10 ans.
Monsieur le président, au lieu de distribuer à la va vite en fin d’année des sommes aux communes, il serait bien plus pertinent de créer d’autres dispositifs y compris exceptionnels ou à titre expérimental.
Quelques idées de ces dispositifs que nous vous soumettons et qui si vous vous engagiez à les adopter nous amèneraient à voter la décision modificative N°2 :
Depuis 10 ans les DMTO n’ont cessé d'augmenter, signe d’un marché de l’immobilier très dynamique, comme on dit, mais dont la conséquence est que beaucoup de Morbihannais et de Morbihannaises n’arrivent plus à se loger. Si ce département prenait à cœur sa compétence première, celle des solidarités, elle aurait dans le même temps consacré une partie de ces rentrées d’argent supplémentaire à une politique bien plus ambitieuse en faveur du logement social ou par exemple, ou à destination des quartiers prioritaires de la ville.
Concernant ce dernier sujet : c’est une faute presque unique au niveau français qu’un département ne soit pas signataire de deux contrats de villes sur 3 existants sur son territoire (en l’occurrence celui d’Auray Quiberon Terre Atlantique et celui de Lorient Agglomération). Les prochains contrats de ville sont prévus pour être finalisés fin 2023. Pouvez-vous nous assurer que le département cette fois-ci, sera enfin au rendez-vous ?
Autre secteur trop peu soutenu et qui pourtant est essentiel à l’ensemble de nos territoires quels qu’ils soient : la vie associative. Nous le savons toutes et tous, les bénévoles sont vieillissants, les générations nouvelles s’engagent moins dans des associations au long cours. Partout l’après Covid a laissé un monde associatif moins dynamique qu’auparavant. Nous avons des associations structurantes dans le Morbihan, je pense notamment à celles qui portent des services pour le reste du monde associatif : type Ressources humaines, administratif... Celles-ci à notre sens méritent un soutien via des subventions de fonctionnement qui permettraient de rayonner à destination de l’ensemble du monde associatif morbihannais. Ce sont des sommes dérisoires à l’échelle du département avec un impact fort sur tous nos territoires.
Et enfin, deux mesures pour l’année 2022, exceptionnelles liées au contexte inédit de l’envolée des prix de l’énergie.
Nous vous proposons de revoir le Fonds de Solidarité Logement (FSL) précarité eau et énergie, à deux niveaux :
Premier niveau : modifier le plafond de ressources permettant d’accéder au FSL, car comme vous, nous rencontrons de nombreuses personnes qui font des demandes et qui ne sont pas retenues car dépassant de quelques euros le plafond fixé. En Morbihan, depuis des années, les ressources des personnes ne doivent pas dépasser 45% du plafond d’accès au logement social. Il est temps d’effectuer une modification.
Deuxième niveau : nous vous proposons d’abonder les aides possibles de 50%. Ces aides n’ont pas été changées depuis au moins 10 ans (2013). Concrètement, une augmentation du plafond d’aide annuel de 350 € à 525 € pour une personne seule et de 450 € à 675 € pour un ménage à partir de deux personnes. Cette proposition est d’autant plus importante que les offices HLM redoutent une forte hausse d’impayés liés au fait qu’une partie du bouclier énergétique ne s’applique par à leur domaine et que certains postes risquent de fortement augmenter (les communs chauffés ou éclairés à l’électricité notamment). L’impact en définitif sera alors sur les offices, impactant leur capacité à investir dans de nouveaux logements pourtant si précieux au vu de la crise du logement dans le Morbihan.
Enfin, dans le même esprit, nous pouvons renforcer le chèque énergie de l’État qui est insuffisant face à l’inflation galopante du moment. Nous vous proposons un chèque de 150€ pour les 13 000 bénéficiaires du RSA, ce qui représenterait moins de 2 millions d’euros.
Si le département allait dans ce sens, il assumerait enfin son rôle de chef de file de l’action sociale au service des plus fragiles d’entre nous.
Je vous remercie.
Damien GIRARD - Président du groupe de Gauche et Écologiste