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Discours de politique générale - décembre 2024

 

Monsieur le Président, chers collègues,

Permettez-moi d’entrer directement dans le vif du sujet. Je consacrerai peu de temps aux questions nationales, par souci de pertinence dans cet hémicycle où, d’expérience, ces débats ne suscitent que peu d’échos. Il serait vain de répéter ici ce qui se déroule ailleurs.

En deux mots, cependant : vous avez pointé l’irresponsabilité de la gauche qui a décidé de faire tomber le gouvernement dirigé par l’un des vôtres. Permettez-moi de rappeler que la chute du gouvernement Barnier était inévitable, sa nomination portrait déjà sa future censure. En ignorant le choix des Français, qui ont placé en tête le Nouveau Front Populaire, le président de la République a mis l’extrême droite une position dominante. Position dont le Rassemblement National a particulièrement profité : mettant Monsieur Barnier au supplice en l’obligeant à mendier sa survie par l’acception des pires mesures du RN. 

Il s’agit de restaurer la démocratie parlementaire, en formant un gouvernement représentatif des résultats des urnes, capable de porter des compromis utiles sans recourir au 49.3. Ce n’est pas dans une alliance opportuniste avec l’extrême droite, qui a toujours porté des projets de division et de destruction, que nous trouverons une issue au services des françaises et français. Malheureusement le nouveau choix d’Emmanuel Macron continue à nier le résultat du 7 Juillet : celui de la volonté du peuple de rompre avec 7 ans de macronisme. Ce jeu avec la démocratie finira mal. 

Le budget du Morbihan : austérité ou ambition ?

Dans ce contexte national incertain, vous avez choisi de rester fidèle à une prudence qui confine à l’inaction, préférant deux fois la retenue plutôt qu’une seule. Résultat : avant même de connaître le budget de notre pays, de connaître la contribution qui sera demandée aux collectivité, vous prenez la décision d’appliquer des coupes par anticipations dans bon nombres de politiques pourtant nécessaires à une grande partie de nos concitoyens. Lors du débat d’orientation budgétaire, nous avons déjà souligné que ni la rigueur ni l’austérité ne constituent des réponses adaptées aux besoins des territoires et des populations en difficulté.

Vous mettez en avant une prétendue "bonne gestion" financière, mais celle-ci dissimule un refus d’affronter les besoins réels. En renonçant à assumer pleinement vos responsabilités, vous affaiblissez notre département. Quelques exemples suffisent à illustrer cette réalité :

Les centres sociaux sont au cœur des compétences départementales. Pourtant, le Morbihan reste le seul département breton à ne pas avoir signé de convention avec eux. Ce choix prive ces structures de plusieurs dizaines de milliers d’euros, alors même qu’elles doivent faire face à des déficits croissants, mettant en danger des emplois et des services essentiels, notamment pour les personnes âgées isolées.

Un responsable de centre social me confiait récemment qu’après avoir réussi cette année à absorber un déficit de 20 000 €, l’année 2025 se profile avec un déficit de 60 000 € si aucune action n’est entreprise. Si rien n’est fait, 2025 sera l’année où les centres sociaux n’auront d’autre choix que de réduire leurs effectifs, ce qui entraînera la diminution des services rendus.

Monsieur le Président, il y a plus d’un an, vous êtes venu à la rencontre des centres sociaux, notamment dans le quartier le plus pauvre de Bretagne, Bois du Château à Lorient. Vous avez pu constater par vous-même l’impact formidable de leur travail. La question est simple : pour quelques dizaines de milliers d’euros, vous avez l’opportunité de transformer positivement la vie de nombreux de nos concitoyens.

Allez-vous, cette fois, être au rendez-vous ?

Le Programme de Solidarité Territoriale (PST) a été un levier essentiel pour réduire les disparités entre les territoires. Pourtant, vous avez choisi de le suspendre, tout comme d’autres dispositifs en faveur de la petite enfance ou de la voirie sur les îles. Ces décisions aggravent les inégalités territoriales et fragilisent davantage les communes qui en ont le plus besoin.

Que vaut une "bonne gestion" si elle abandonne des milliers de Morbihannais en difficulté ? Nous vous avons proposé une solution pour atténuer les conséquences de ce choix : maintenir cette aide pour les communes les plus fragiles, celles qui bénéficient le plus de ce programme de solidarité territoriale. La gestion de cette discrimination pourrait être confiée à l’Association des Maires de France (AMF) du Morbihan, afin de garantir une allocation juste.

En outre, la suppression brutale de ce programme aura un autre impact majeur : une réduction des commandes publiques. Or, la commande publique constitue un soutien vital à l’activité économique, particulièrement en cette période où de nombreux plans sociaux sont en cours. En abandonnant ce soutien, vous contribuez à amplifier une crise économique qui ne fait que commencer.

Le Logement Social : une crise que vous ignorez

Jamais la crise du logement n’a été aussi grave dans notre département. Pourtant, après avoir œuvré à la fusion des trois offices de logements sociaux pour créer Morbihan Habitat et après avoir affiché une ambition de 1 000 logements par an avec une injection de 5 millions d’euros sous forme de titres participatifs, vous décidez cette année de réduire cette contribution de 5 à 1 million d’euros.

Initialement, l’engagement était sur 5 ans de 50 millions d’euros, répartis à parts égales entre le Département d’une part, Lorient Agglomération, et GMVA d’autre part. Si vous réduisez votre apport, devons-nous en déduire que les autres collectivités suivent cette même tendance à la baisse ? Si tel est le cas, que reste-t-il de l’ambition initiale ? Nous sommes déjà passés d’un objectif de 1 000 logements sociaux par an à 700 logements nets, une fois les déconstructions déduites.

Les Morbihannaises et les Morbihannais doivent comprendre que, face à ces renoncements, la crise du logement risque malheureusement de se prolonger.

Quels messages envoyez-vous ?

 

D’un côté, vous réduisez les fonds alloués à Morbihan Habitat ; de l’autre, vous allouez 2,3 millions d’euros en 2025 à la Compagnie des Ports et accordez une avance de 2 millions pour son programme d’investissement. Pensez vous que vos priorités sont les bonnes ?

Par ailleurs, Morbihan Habitat a lancé récemment une opération de rappel de charges qui met ses locataires en difficulté, et ce, en pleine période de fêtes. Ces locataires n’ont reçu aucune information préalable, alors que le nouveau marché du gaz avait été conclu dès la mi-2023.

Chaque année, le Fonds de Solidarité Logement (FSL) est sous-consommé. Je vous ai écrit pour demander l’automatisation des aides pour les locataires en difficulté suite à ces rappels de charges inattendus. À ce jour, vous n’avez pas répondu à ma sollicitation écrite.

Une demande urgente

Monsieur le Président, je vous interpelle ici : pouvons-nous mettre en place un dispositif spécifique pour accompagner ces personnes en détresse ? Cette mesure d’urgence est essentielle pour préserver la dignité et le bien-être des locataires les plus fragiles.

Une communication questionnable

Il est étonnant de constater qu’en matière de communication, la notion d’austérité et de rigueur est absente. Vous avez ainsi décidé que les véhicules utilisés par les agents du département devaient désormais être floqués aux couleurs du département.

Au-delà des dépenses inutiles que cela représente, ce choix soulève des préoccupations plus graves. En effet, ce marquage peut engendrer des conséquences négatives, notamment un risque de stigmatisation pour les personnes accompagnées par les travailleurs sociaux. Cela pourrait également exposer nos agents à des situations où leur sécurité serait mise en péril.  Dans un courrier que nous vous avons précédemment envoyé, nous vous demandions de laisser aux agents la possibilité d’avoir recours à des véhicules plus neutres.

En politique, la communication ne devrait jamais se substituer à des politiques publiques ambitieuses. Trop souvent, elle est utilisée pour masquer des insuffisances ou des manques dans l’action réelle.

Des points positifs à souligner

Pour être juste, certains efforts méritent d’être reconnus. Vous maintenez une ambition dans le dispositif “Territoire Zéro Chômeur”.

Mais cette initiative reste trop isolée. 

Un budget n’est pas qu’une série de chiffres ; il est l’expression d’une vision politique. Celui que vous proposez reflète un manque criant d’ambition, de courage et d’empathie. Vous aviez promis un mandat centré sur le social, mais votre politique, faite de renoncements et de calculs comptables, s’en éloigne chaque année un peu plus.

Monsieur le Président, il est encore temps de rectifier le tir. L’avenir de notre département ne peut être laissé à une gestion de court terme, insensible aux souffrances des plus fragiles. Je vous invite à redonner au Morbihan un cap ambitieux, solidaire et à la hauteur des défis que nous avons à relever ensemble.

Je vous remercie

Damien Girard - Président de groupe