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Discours de politique générale - Mars 2024

Monsieur le Président, chers collègues,

Pour débuter, je dirai un mot sur la situation internationale, en mettant l’accent sur l’Ukraine et le Moyen-Orient.

 En Ukraine

La situation est critique, les Ukrainiens ont besoin de soutien concret, notamment financier et militaire, pas de déclarations enflammées qui parfois ont comme principal résultat la déstabilisation du camp européen. Depuis le début de notre mandat, notre soutien s’est manifesté à plusieurs reprises par notre proposition d’une ligne budgétaire d’aide de 400 000 € votée à l’unanimité ou par le vœu que nous vous proposions lors de la dernière session. Nous n’avons pas d’autres choix que de, collectivement, persister à soutenir les Ukrainiens qui, avec un courage remarquable, se battent pour préserver leur pays de l’envahissement. La défaite de Poutine en Ukraine est la meilleure garantie de paix pour notre continent.

Situation en Palestine

Nous avions fermement condamné l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre dernier, mais rien ne doit justifier le massacre aveugle de milliers d’êtres humains dans la bande de Gaza, en particulier d’enfants, qui ne portent aucune responsabilité dans ce conflit. Cette vengeance sanglante est une voie sans issue.

La communauté internationale doit maintenant suivre les recommandations de l’ONU qui mentionne « un risque génocidaire ». Il faut lancer une enquête permettant de qualifier ce qui relève des crimes de guerre. Il faut obtenir un cessez-le-feu afin que Gaza puisse bénéficier au plus vite d’une aide humanitaire massive pour contrer la famine en cours.

A notre échelle, ne pourrions-nous pas soutenir une initiative telle que « Copain du Monde », portée par le Secours Populaire, ou une opération de ce type, pour accueillir des enfants de la bande de Gaza dans le Morbihan.

 

J’en viens à l’Urgence écologique

L’année 2023 détient une série de records alarmants : celui de l’année la plus chaude jamais connue, celui de la troisième année la plus grave en termes de sinistres climatiques en France avec ses 15 tempêtes aux vents supérieurs à 150 km/h, 14 inondations, et une facture à 6,5 milliards d’euros qui vient de tomber et inquiète les assureurs.

Pour rappel, sur la période allant de 1990 à 2020 le coût annuel était de 2,3 milliards d’euros. 

Compte tenu de ces risques, l’association française des assureurs estime qu’à l’horizon 2050 une commune sur dix pourrait ne plus être assurée. Clairement l’inaction climatique coûte plus chère que d’agir. 

Ces chiffres devraient nous imposer une réflexion constante pour travailler au plus vite l’adaptation aux changements climatiques et la réduction de nos émissions. Cela veut dire revoir de fond en comble nos dogmes et nos convictions : nous n’atteindrons pas les objectifs par quelques ajustements ou de petits gestes, Rozenn Métayer en reparlera tout à l’heure au sujet des rénovations thermiques.

Nous devons réduire drastiquement nos consommations d’énergie, nos émissions de gaz à effet de serre, et développer massivement les énergies renouvelables dans les 10 années à venir. Elles sont les seules capables d’assurer une sortie rapide des énergies fossiles dans ce laps de temps.

 

Statut de l’élu

A propos du statut de l’élu, le vote d’une loi en la matière au Sénat récemment constitue une avancée, mais cela reste largement insuffisant. Nous regrettons qu’un certain nombre de parlementaires se refusent à entendre que dans beaucoup de communes, les élus locaux sont les derniers services publics et les derniers piliers de la République. Sans revalorisation sérieuse du niveau des indemnités et des cotisations associées, au regard des missions d’élus, nous risquons de ne pas avoir de candidats dans bon nombre de zones rurales et dans les communes de taille moyenne. 

Un exemple symbolique dans la proposition de loi : il y a eu initialement, une proposition d’1 trimestre de retraite pour 1 mandat complet d’élu peu importe le mandat. Mais, avant l’examen par les députés c’est désormais 1 trimestre seulement pour les adjoints et les maires. Est-ce le moment de ce genre de pingrerie ? Quand, depuis 2020 c’est 20% de démissions dans le Morbihan. Est-ce la reconnaissance que la République doit à l’engagement de ses élu.es, quand on sait les difficultés rencontrées pour mener une carrière professionnelle en parallèle de ses mandats ? Est-ce de cette manière que nous favoriserons l’engagement des jeunes ? 

De notre point de vue, les élus locaux méritent, comme les parlementaires, une protection et un système de retraite qui correspond réellement à l’engagement qui aura été le leur durant leur mandat. 

 

 

Constitutionnalisation de l’IVG

Le 8 mars 2024, la liberté garantie de recourir à l’avortement a été inscrite dans la constitution, après de longs débats parlementaires. L’un des arguments contre, notamment utilisé par la droite, était de dire que le vrai combat était celui des moyens à déployer pour rendre le droit à l’IVG effectif partout sur le territoire national.

Nous partageons le constat mais pas la réponse : oui, nous pensons qu’il faut d’urgence renforcer les moyens pour permettre à toutes les femmes d’accéder réellement à cette liberté garantie. 17% des femmes doivent sortir de leur territoire pour une IVG, et ce chiffre frôle les 50% dans les départements ruraux. 130 centres d’IVG ont fermé en 15 ans, et les femmes doivent encore faire face à de la désinformation de militants anti-choix, de discours culpabilisants, des difficultés dans la prise de rendez-vous, et n’ont pas toujours le choix dans la méthode utilisée. Mais si nous pensons qu’il faut déployer des moyens plus importants, nous nous félicitons en même temps de l’inscription dans le marbre de la liberté garantie à recourir à l’IVG.

Nous l’avons dit ici plusieurs fois et les derniers sondages pour les élections européennes le montrent, l’extrême droite n’a jamais été aussi proche du pouvoir dans notre pays. Les exemples de l’Italie ou de la Pologne l’illustrent bien : une fois au pouvoir, il ne lui faut jamais beaucoup de temps avant de s’attaquer aux droits des femmes. C’est l’une des raisons pour laquelle il était nécessaire d’inscrire l’IVG dans la constitution. C’est quand nous sommes en capacité de protéger une liberté qu’il faut le faire ; quand celle-ci est menacée, il est déjà trop tard.

Alors maintenant que l’IVG est une « liberté garantie », nous nous réjouissons d’un prochain vote à l’unanimité pour renforcer les moyens pour l’accès de toutes à l’IVG.

 

Budget de l’État

Le déficit public de 2023 de la France a été annoncé en début de semaine à 5,5% du PIB, soit 15,8 Milliards de plus que les dernières prévisions du gouvernement. Ici votre majorité n’a de cesse de répéter la nécessité de rigueur et de sérieux budgétaire, alors qu’au niveau national le ministre de l’Economie et des Finances, issu comme vous de la droite LR (Les Républicains), réalise un dérapage que jamais la gauche ne s’est permis de faire quand elle était en responsabilité.

Le déficit constaté serait principalement dû à un ralentissement de la croissance et des recettes fiscales moins importantes que celles prévues : 21 milliards d’écart par rapport à ce qui était attendu. Concernant les dépenses, elles correspondent aux prévisions. 

Ces dérapages, ce sont les révélateurs de l’échec du modèle de développement économique voulu par ce gouvernement. Celui-ci devait être dopé par les baisses, et des suppressions de fiscalité doublée d’une distribution tous azimuts d’aides aux entreprises : suppression de l’ISF, mise en place d’une flat tax, 160 milliards d’aides publiques aux entreprises…. 

La conséquence de cet échec, c’est donc de trop faibles rentrées fiscales, des inégalités qui n’ont eu de cesse d’augmenter. Le ruissellement ne fonctionne pas, les plus riches s’enrichissent comme jamais, faisant sécession avec le reste de la société. Depuis 2020, les 10 premiers milliardaires ont gagné 189 milliards d’euros, l’équivalent de deux ans de factures de gaz, d’électricité et de carburant des françaises et français (données OXFAM).

Même une partie de la majorité, les centristes estiment qu’il faut reconsidérer cette question et demander à ceux qui ont beaucoup de contribuer plus au fonctionnement de l’Etat. 

Malheureusement, les solutions proposées à ce jour par le ministre de l’Economie et des Finances, reprises par Gabriel Attal ne prennent pas ce chemin. 

Ce sont les dépenses sociales, qui elles ne dérapent pas, qui vont être principalement mises à contribution : notamment en réduisant les droits des personnes privées d’emploi. Le développement économique n’est pas au rendez-vous, mais ce serait donc la faute des personnes privées d’emploi et ce sont eux qu’il faudrait sanctionner ? Ce cynisme, cette stigmatisation, cette guerre aux plus fragiles est insupportable et fractionne notre société. 

Ce sont aussi des rabots budgétaires qui sont annoncés générant encore la baisse de services publics. Les défis auxquels nous faisons face, au premier rang desquels l’urgence écologique, ne pourront être relevés qu’à condition d’une mobilisation réelle pour construire du commun et préparer l’avenir.

 

France Travail

Le 15 mars nous avons organisé une rencontre autour de la réforme de France Travail avec notamment Caroline Roger-Moigneu, vice-présidente à l’insertion au conseil départemental d’Ille-et-Vilaine. L’expérimentation de la loi plein emploi faite dans le Pays de Redon nous montre que c’est bien le renforcement de l’accompagnement des allocataires du RSA qui donne des résultats en termes de retour à l’emploi, pas la stigmatisation. Le département d’Ille-et-Vilaine a refusé la contrepartie de 15h d’activités par semaine contre le versement du RSA, et mis les moyens sur l’accompagnement social notamment le volet de la garde d’enfants, l’accompagnement professionnel, et les sujets de santé et de santé mentale. Si cette réforme doit se déployer dans notre département, nous considérons que c’est le chemin à suivre.

Une participante de la table ronde l’a bien dit, forcer les gens à travailler sans s’attaquer à la pauvreté est vain. On ne règlera pas le problème de l’emploi sans traiter les questions de mobilité, de logement, de santé, de garde d’enfants ou d’alimentation.

Le retour à l'emploi ne se décrète pas comme l'affirme le Gouvernement, il se construit, s'accompagne et nécessite des moyens.

Ne pourrions-nous pas prévoir des temps de travail avec les élus que cela intéresse, pour préparer l’arrivée de cette réforme dans notre département sans attendre qu’elle nous tombe dessus ? Profitons d’avoir autour de nous deux départements qui participent à l’expérimentation de cette réforme pour pouvoir travailler en anticipation sur une application non stigmatisante et efficace, avec les spécificités de notre territoire. 

 

Loi Bien Vieillir

La loi Bien Vieillir a été adoptée au Sénat mercredi avec une déception énorme : celle de voir encore une fois la loi de programmation financière reportée, comme elle l’est de manière récurrente depuis 2018. Le défi démographique qui nous attend est colossal : le nombre de Bretons de plus de 75 ans augmentera de plus de 75% d’ici 2040. Face à ce défi, le gouvernement propose du bricolage. Or nous ne pourrons pas faire face à la transition démographique en cours sans un projet global et des investissements supplémentaires.

Si cette loi est insuffisante, elle est néanmoins nécessaire : elle prévoit notamment la création d’un service public départemental de l’autonomie, un guichet unique permettant de simplifier les démarches. Passé la question du nombre de guichets uniques qui s’accumulent, nous nous demandons Monsieur le Président si vous avez commencé à vous préparer à la création de ce SPDA ?

La loi Bien Vieillir propose aussi des mesures en faveur des aides à domicile, et notamment la possibilité pour 10 départements d’expérimenter le remplacement de la tarification horaire des services d’autonomie à domicile par une tarification globale ou forfaitaire. Nous proposons que le département du Morbihan, qui est un des départements en France le plus concerné par le vieillissement de sa population, candidate à cette expérimentation pour juger si celle-ci nous permet d’améliorer les services et les conditions de travail des aides à domicile.

 

Associations d’aide aux démunis

J’en terminerai par la précarité. Nous avons rencontré des associations qui viennent en aide aux personnes les plus précaires dans notre département. Elles partagent le constat d’une précarité croissante chez les plus jeunes (notamment les étudiants), chez les plus âgées, et chez les femmes, notamment les mères célibataires. Beaucoup de ces associations nous ont dit les difficultés qu’elles subissent face à l’inflation et face aux coûts de l’énergie et des denrées alimentaires qui augmentent fortement.

Encore un exemple très concret sur notre canton : lors d’une maraude que nous avons effectuée avec ma collègue Rozenn Métayer à la Croix Rouge Française, nous avons constaté une augmentation du nombre de personnes accompagnées par l’association. Entre 2022 et 2023, c’est 20% de bénéficiaires en plus sur l’antenne de Lorient.

Les Restos du cœur ont lancé un appel national en septembre 2023 et rappelé le double effet de l’inflation (de 5,2% en 2022 et 4,9% en 2023) : la demande d’aide alimentaire augmente parce que les ménages ne parviennent plus à faire face à l’augmentation de l’ensemble de leurs factures, et les associations doivent acheter plus et plus cher pour faire face à cette demande. Ce constat, nous le partageons dans le Morbihan. Les subventions de fonctionnement versées à la Croix Rouge Française, à la Banque Alimentaire, aux Restos du cœur, au Secours Populaire, le Secours Catholique n’ont pas bougé depuis bientôt 10 ans : nous vous demandons Monsieur le Président de bien vouloir les revaloriser pour aider ceux qui aident les plus fragiles de nos concitoyens.

Voilà Monsieur le Président, chers collègues, les préoccupations que nous voulions partager avec vous et les propositions de notre groupe de Gauche et Ecologiste.

Damien GIRARD - Président du gourpe de Gauche et Écologiste