Monsieur le Président, Cher-e-s collègues,
Je profite de cette assemblée fournie de conseillers départementaux et de responsables des services présents pour proposer une offre d’emploi… Je ne doute pas que dans vos réseaux, vous allez trouver cette perle rare qui permettra, avant Noël, de satisfaire les exigences de l’employeur, avant le 3/01/2023, date prévue de l’embauche.
Cette offre se situe sur le bassin d’emploi de Lorient / Quimperlé et concerne, au-delà de l’agglomération de Lorient, les villes du Faouët, Guémené,… bref, l’offre raisonnable d’emploi dont la mobilité est égale à 30 km de Lorient … Je suis au regret de vous annoncer que la personne choisie n’obtiendra pas de frais de transports ni de restauration.
Évidemment, il y a des critères :
- en tout premier lieu, être reconnu travailleur handicapé
- être demandeur d’emploi inscrit à Pôle Emploi depuis + de 12 mois
- et surtout (je cite) « Être une personne motivée qui aime la relation avec les enfants »
- en dernier lieu il faudra être rapide et supporter un environnement bruyant (puisque c’est un temps de service de cantine … !)
Voilà, Monsieur le Président et chers collègues, un joli contrat PEC de 20 h par semaine soit 24 h lissé (car pendant les vacances scolaires, il n’y aura que quelques jours de travail pour faire le ménage de la structure… SIC)
Un joli contrat aux horaires suivants :
- de 11h30 à 15 h et
- de 16h30 à 19 h
(avec plus ou moins une demi-heure sur le temps de midi… )
Un joli contrat qui sera (grassement) rémunéré environ 740 € par mois (net)…
Alors, Oui, Monsieur le Président, nous sommes dans l’hésitation de voter la politique départementale de l’insertion que vous nous proposez … et cette offre d’emploi en est la raison principale… J’ai tendance à vous dire que cette offre d’emploi, c’est le dilemme de tous les travailleurs sociaux, en tous genres et en tous poils qui interviennent dans ce département, qu’ils soient conseillers en structures d’insertion, agents du Pôle Emploi ou assistants sociaux …
Doit-on communiquer ce type d’offre d’emploi à un privé d’emploi ? 740 € est-il suffisant pour vivre décemment ? Comment fera la personne embauchée qui sera « en coupure » entre 15 h et 16 h 30 ? A la faveur de l’augmentation du prix de l’essence, peut être choisira-t-elle de rester sur place dans un coin à lire un livre (ou apprendre son code de la Route… car elle n’a pas le permis !) …
Peut-être en profitera-t-elle pour faire quelques courses au supermarché du coin… car à 19 h (fin de son travail), elle n’aura pas le temps de s’y rendre ?
Ou bien … elle pourra s’avancer dans son travail et faire quelques heures supplémentaires non payées …
Non, quand nous évoquons l’accès aux droits, la lutte contre la précarité, l’accès à une formation qualifiante de qualité et correctement rémunérée, l’aide aux plus démunis et aux plus fragiles, nous n’oublions pas dans notre groupe de Gauche de nous élever contre des pratiques insoutenables de la part des employeurs… Nous voulons que soit étudié et chiffré le non-recours au RSA !
Nous sommes attachés à la justice sociale, nous voulons lutter contre le non-recours aux droits en mettant en place des mesures permettant de favoriser l’accès aux technologies de l’information et de la communication pour tous, mais aussi l’accès à la culture, au sport, aux vacances.
Les associations caritatives et de solidarité sur le territoire de Lorient Nord nous l’ont dit : de plus en plus de précaires, de plus en plus de travailleurs pauvres, de plus en plus d’étudiants qui ne peuvent manger … Or, vous refusez d’étudier la mise en place d’une allocation d’autonomie de la Jeunesse, vous diminuez l’attribution d’aides directes aux personnes en difficultés d’insertion au motif que le nombre de bénéficiaires du RSA baisse, vous refusez de voir les « invisibles », ceux qui vivent dans la rue, étudiants en cités universitaires mal logés et /ou foyers de jeunes travailleurs … et à Lorient et Vannes, hier, les maires ont décidé d’ouvrir les gymnases pour lutter contre le grand froid... C’est ça, la société qu’on propose en 2023 ?
Officiellement, la Région présente en cette année 2022 le taux de chômage le plus faible des différentes Régions françaises avec un taux de 5,9 %, d’ailleurs reproduit dans le département du Morbihan dans son ensemble. Les bassins de Vannes, Ploërmel, Pontivy - Loudéac (bassin mixte sur deux départements) présentent des taux de moins de 6 %.
Les bassins d’Auray et de Lorient sont plus frappés par le chômage (on est au-dessus de 6 %) et il convient d’être attentifs aux bassins de Carhaix et de Quimperlé qui comprennent certaines communes du département (Gourin, Le Faouët, Guiscriff par exemple).
Passons aux trois bassins d’emplois littoraux.
Pour celui de Vannes, on compte 12 180 offres recensées dont 36,4 % au titre de l’emploi saisonnier.
Dans le bassin de Lorient, on compte 9 970 offres d’emploi dont 31 % de saisonniers, dont 1 180 postes dans le secteur Hôtellerie Commerce Restauration et autant dans le champ des postes d’ouvrier non qualifié de l’industrie.
Pour le bassin d’Auray, largement orienté sur la côte, comprenant entre autres les communes de Carnac, de Belle Ile en Mer, de la presqu’île de Quiberon, de la ria d’Etel et d’une bonne partie du Golfe, nous avons 7 600 propositions d’embauche dont plus de 60 % de saisonniers.
Donc, si officiellement le chômage est en baisse, regardons le caractère saisonnier des emplois proposés, qui doit nous alerter sur la structure de l’emploi et qui conditionne le retour au travail …Le conseil départemental doit être attentif aux chiffres de l’emploi et à la structure de l’emploi et surtout pro - actif !
Monsieur le Président, nous validons les principales propositions du rapport, mais nous avons des divergences et des différences sur le diagnostic et les solutions à apporter … (Mais me direz-vous, c’est un peu normal, vous êtes la majorité et nous sommes l’opposition… et vous avez raison !)
Il n’empêche que sur ce département, nous faisons entendre une voix différente et dissonante, constructive et non complaisante, sans langue de bois …
Monsieur le président, pourriez-vous, faire étudier aux services le non-recours aux droits au RSA, en appui des services de l’État et de la CAF, dans le cadre de l'expérimentation nationale qui sera proposée ?
L’automaticité des aides est bénéfique pour les habitants et pour notre collectivité (en termes de santé, précarité…). Il y a déjà des expérimentations qui débutent, notamment chez nos voisins en Ille-et-Vilaine et en Loire Atlantique, avec l’objectif de renforcer le soutien aux allocataires du RSA. Ne loupons pas le prochain train avec l’expérimentation proposée par le gouvernement : les territoires zéro non-recours.
Catherine QUÉRIC